Artistes
Julien Gorgeart : né en 1979 à Quimper, vit et travaille à Saint Lumine de Clisson.
À deux pas du reste du monde, 2019La Borne, Pithiviers
… et derrière moi marchent les étoiles, 2014Frac des Pays de la Loire
Expositions personnelles
2019
- «A deux pas du reste du monde», Le pays où le ciel est toujours bleu, Pithiviers
2018
- «Juste après la nuit», Centre d'art contemporain La chapelle des Calvairiennes, Mayenne
2017
- «Entêtant», Galerie ALB, Paris
2016
- «Cent ans de solitude», Galerie Net Plus, Cesson-Sévigné
2014
- «Une histoire vraie», Musée des beaux-arts - Artothèque, Brest
2011
- «Vestiges», Galerie Aktinos, Quimper
Expositions collectives
2020
- «Tout le monde m'adore», Crypte d'Orsay, Orsay
2019
- «Beat connection», Galerie Ping Pong, Rennes
2018
- «Paysage,présage», Galerie du Présidial, Quimperlé
2017
- «Salon ArtParis», Galerie ALB, Paris
- «Photos graphies», Galerie des petits carreaux, Saint-Briac
2016
- «L’état des choses», Parlement de Bretagne, Rennes
- «Collections 4», Orangerie du Thabor, Rennes
2015
- «ça ira mieux demain», Galerie ALB, Paris
- «Salon Zürcher», Galerie ALB, Paris
- «Des envies d’eux», Galerie ALB, Paris
- «TESTOSTERTWO», École d’art de l’ACBA, Bayonne
2014
- «40 x 30», Galerie ALB, Paris
- «La petite collection», Galerie White project, Paris
- «Let’s PLay», dans le cadre de PLAYTIME, Biennale d’art contemporain, ESAB, Rennes
- «SEA, ART & SUN», Galerie ALB, Paris
- «Tribu(ne)», Manoir St Urchaut, Atelier D’estienne, Pont-Scorff
- «Peindre #2», Galerie Mica - Rennes
- «L’écho/ Ce qui sépare», FRAC Pays de la Loire, Carquefou
2013
- «MILLEFEUILLE», Galerie Hélène Bailly, Paris
- «Jardins sensibles - Jardins secrets », Domaine de la Roche Jagu, Ploëzal
2012
- «Pelouses Interdites», La Ruche, Sotteville-les-Rouen
2011
- «Plaisir et dépendance», Galerie Rouge, Pont L’Abbé
Résidences
2016
- «les Ailes de caïus», Avec la ville de Rennes et l'association les Ailes de caïus
Bourses, prix, aides
2021
- Subvention d'allocations d'installation d'atelier et d'achat de matériel DRAC des pays de la Loire
2020
- Aide à l’écriture pour la nouvelle version de la série “La Cascadeure”, Région Bretagne
2014
- Attribution d’une bourse d’aide à la création, Ville de Rennes
2013
- Attribution d’un atelier logement par la ville de Rennes
Publications, diffusions
2016
- «Banana Split, Volume 1», Taf mag, 128 pages
- «L'écho / Ce qui sépare , catalogue d'exposition», Frac Pays de la Loire, 132 pages
2013
- «Millefeuilles, catalogue d’exposition», Hélène Bailly Gallery, 52 pages
- «Jardins secrets, journal d’exposition», Domaine de la Roche Jagu, 56 pages
Collections publiques, acquisitions
2019
- La cascadeure, acquisition 1 exemplaire Frac Bretagne
2015
- Hors champs & Playtime, acquisition par le Fonds communale d’artde la ville de Rennes
2014
- Sans titre, Herodiade, acquisition par le Musée des Beaux Arts de Brest
Workshops, enseignement
2019
- Workshop " 3 minutes ", EESAB site de Quimper
Écoles, formations
2010
- DNSEP Option Art Ecole Supérieure d’art de Quimper
2008
- DNAP Option Art, Félicitations du Jury Ecole Supérieure d’art de Quimper
Autres
2021
- Sélection du projet "La Cascadeure" au festival FIDLAB 2021
2017 - 2019
- Projet LA CASCADEURE en co-création avec Virginie Barré et Romain Bobichon
2019
- Diffusion saison 1 La Cascadeure sur https://www.saisonvideo.com/
- Exposition «La cascadeure» , Centre d’art contemporain La passerelle, Brest
- Exposition «La cascadeure» , Centre d’art contemporain 40mcube, Rennes
- Diffusion «La cascadeure» , HAUS, Nantes
2018
- Exposition «La cascadeure» , Centre d’art contemporain L’espace croisé, Roubaix
2019
- Visuel couverture de l’album “A dream is u” de Francis Lung
2017
- Présence de plusieurs peintures dans les décors du film “Diane a les épaules” de Fabien Gorgeart
2013
- Visuel couverture de l’album “Himera” de Postcoïtum
Juste après la nuit
Dans ses œuvres, peintes comme on raconte une histoire, Julien Gorgeart nous invite à parcourir un réel réinventé. Si ses peintures sont pour lui l’occasion d’évoquer l’intime et le quotidien, ces évocations n’en demeurent pas moins des mises en scènes savamment orchestrées au pouvoir évocateur universel. Car les apparences sont trompeuses et nous ne sommes ici ni dans le témoignage, ni dans le documentaire mais bien dans un récit fictif et ouvert à l’interprétation. De cette théâtralisation se dégage une mise à distance qui permet à Julien Gorgeart de s’écarter d’une narration trop personnelle pour entrer dans la force évocatrice des histoires collectives. Il est aisé de s’identifier à ces figures presque anonymes qui semblent continuellement en recherche d’une contenance, de la juste posture à adopter dans un monde contemporain complexe et parfois trop lourd à porter. De même, ces scènes inscritent dans un temps suspendu figurent des non lieux éveillant un sen ment de familiarité chez celui qui les contemple. En déployant un travail de recherche picturale centré sur l’image et l’illusion qu’elle renvoie, Julien Gorgeart interroge notre rapport au réel et à sa représenta on. L’image est toujours une construction et l’artiste en- tend le démontrer en jouant de ses artifices qu’il explore minutieusement au fil de ses peintures. Le flou, le flash, le gros plan et le décadrage sont autant de moyens pour lui de questionner ce que la photographie a su apporter à la peinture et de quelle manière il advient à un plasticien de s’en saisir aujourd’hui. En appliquant les caractéristiques de la photographie à la peinture, Julien Gorgeart vient remettre en question ce qui fait image au sens photographique du terme et brouille les frontières établies entre les deux mediums. Chaque œuvre est alors l’occasion de reconsidérer ce qui relève de la peinture et à contrario ce qui relève de la photographie et d’ainsi déconstruire les attentes du regardeur. Mais il ne s’agit pas seulement là de rejouer les trucages propres à la photographie par le simple glissement d’un medium à l’autre puisque l’artiste s’empare de ces artifices et les manipule pour les mettre au service de son sujet en en faisant de véritables éléments narratifs. De fait, l’usage du décadrage, du flou ou encore du contre-jour se révèlent être des éléments essentiels à la compréhension de ses œuvres et c’est là, dans la liberté qu’il prend à parfois contredire les règles photographiques et grâce à une technique picturale poussée, que réside toute la singularité du travail de Julien Gorgeart.
Chloé Beulin
Texte écrit à l'occasion de l'exposition "Juste après la nuit" au centre d'art Le Kiosque, Mayenne - 2018
Trouble comes knocking
And all you fair weather watchers
Watch out and beware
When your trouble comes knocking
I hope you ain’t there
Timber Timbre – Trouble comes Knocking (2010)
Les toiles et les aquarelles de Julien Gorgeart semblent témoigner du monde contemporain, celui dans lequel l’artiste et le regardeur évoluent. Il figure la banalité du quotidien peuplé de fêtes dans les salons, de virées nocturnes entre amis, de paysages urbains et de natures mortes intimes. Malgré les apparences hyperréalistes, Julien Gorgeart est un peintre du simulacre. Au pinceau, il traduit le monde réel afin d’ouvrir des perspectives narratives et cinématographiques. Gilles Deleuze écrit que « le simulacre est ce système où le différent se rapporte au différent par la différence elle-même. » (Différence et Répétition – 1968). Avec une fidélité de type photographique, ses œuvres représentent des scènes de vies quotidiennes. Pourtant, la réalité n’y est qu’illusion, simulation et réactivation. Issues de sa propre expérience, de celles de ses proches ou d’inconnus, les images subissent un véritable travail de montage. Après avoir évolué dans l’univers de la vidéo, de la photographie et du théâtre, l’artiste se dirige finalement vers la peinture. Il est notamment séduit par sa temporalité, son exigence et la liberté qu’elle procure dans la composition et la couleur. Sur la toile et sur le papier il construit ses images en mixant d’autres images. Le réel est simulé. La « différence » dont parle Deleuze est difficile à identifier, la frontière entre la réalité et son fantasme est mince, voire quasi imperceptible.
Julien Gorgeart déploie une dimension cinématographique dans sa peinture en récréant des scènes où chaque détail est repensé : les décors, les couleurs, les lumières, les postures, les expressions, les textures. Le quotidien est interprété par l’association d’images provenant de sources différentes : les photographies de l’artiste, des images récoltées sur Internet ou encore des photogrammes de films. Les œuvres sont les résultats d’une adéquation de réels fragmentés et recomposés. Une femme, nue sous la douche, nous dévisage d’un regard blasé ; une voiture couverte d’un drap blanc erre à l’entrée d’une palmeraie ; des serviettes de bains sèchent dans le désordre d’une arrière cour ; une araignée aux longues pattes s’approche de pieds nus ; un homme ivre et joyeux trinque allongé sur le sol. Chaque scène peut être comprise comme une amorce narrative, un espace de projection où une histoire est en train de se jouer. L’imaginaire et le réel fusionnent pour donner naissance à un univers où la sensation du réel est insufflée. Le traitement des images et les choix chromatiques génèrent une ambivalence où cohabitent le drame et l’insouciance. Les figures humaines y sont vulnérables. Une main nous présente le Polaroid d’une femme aux seins dénudés : est-elle morte ? Qui la recherche ? Est-ce le souvenir d’une histoire passée ? Présente ? Parce que les ingrédients du mystère et du suspens sont mis à l’œuvre, tous les scénarios semblent possibles. En retenant des fragments de son expérience personnelle, de son histoire, Julien Gorgeart déroule lentement, avec le temps de la peinture, les images de sa propre histoire, de son propre film dont il sélectionne et reconstitue chaque détail. Les natures mortes côtoient des scènes marquées à la fois par une joie de vivre et une désinvolture, mais aussi par des caractéristiques énigmatiques et insaisissables. En combinant les histoires, les époques et les géographies, l’artiste produit une peinture où le quotidien est théâtralisé. Il explore une zone ténue où la réalité est finalement augmentée.
Julie Crenn
La peinture est un crime presque parfait – Julien Gorgeart, artiste du surbanalisme fantastique
Julien Gorgeart construit des images réussies comme on rate parfois ses photos, fixant l’objectif sur un détail incongru, le flash pointé sur les yeux du sujet (Saynète), dans un art du décadrage assez éblouissant. Une femme nue sous la douche, laissant apparaître la naissance de seins lourds, défiant le regardeur qui voudrait en voir davantage, semble ainsi écrasée par le carrelage d’une salle de bain qui l’emprisonne (Motel, huile sur toile, 134 x 106 cm), quand un fêtard ivre, allongé sur le sol, une coupe à la main, est la victime consentante d’une prise de vue en plongée radicale (l’aquarelle Jour de fête, 39 x 52 cm). Dans son Manuel de la photo ratée, Thomas Lélu faisait en 2004 la liste des plantages possibles, dont on devine qu’un artiste tel que Julien Gorgeart peut faire ses délices: «la photo avec objet interposé», «la photo de fête», «l’air bête», «la photo sans recul», «yeux rouges»…
S’il y a du carnavalesque dans cette œuvre où le peintre sait prendre à la photographie sa vitesse d’intervention, cette capacité à surgir sans crier gare dans la réalité (Serpentins et cotillons), le sentiment d’un exil est cependant bien présent, tant guettent ici la tristesse, la ruine et le feu (la série Habitation). Pas de strict mimétisme, mais une construction des apparences, où règnent inquiétante étrangeté et mentir-vrai. L’aquarelle donnant le titre à cette exposition (Une histoire vraie) reproduit ainsi le polaroïd d’une jeune femme dénudée mais en culotte, dont on ne voit pas le visage, image dans l’image, tenue par la pince d’une main peinte en gros plan, tandis que serpente sur le sol ce qui ressemble à un câble électrique. Que s’agit-il de comprendre? Faut-il mener l’enquête comme dans Meurtres sur Canapé, cette autre aquarelle où sont juxtaposés deux couvertures de livres (Alabama Song, une série (Super) Noire) et le dessin d’une biche regardant le spectateur? Est-ce un calembour visuel et pourquoi cet effacement des noms, que l’esthète paranoïaque rétablira (Giles Leroy, Burt Hirschfeld)? Le montage intrigue, séduit, le cinéma est permanent.
En effet, Julien Gorgeart est un peintre cinéphile. Les références au septième art sont omniprésentes, de Jacques Tati (Playtime), à David Lynch ou Cronenberg (Faux semblants), non sans ironie (Saturday night fever façon Lucian Freud). Le goût du pavillonnaire, de la banalité dévorante et d’une certaine désespérance contemporaine (nos piètres jouissances) n’est en outre pas sans évoquer à la fois les premiers films de Wim Wenders, mais aussi le travail photographique de Ronan Guillou sur Los Angeles ou les nouvelles de l’écrivain américain John Cheever, le «Tchekhov des faubourgs». L’installation Le Clos normand, mettant en scène une palissade devant une toile représentant le faîte de palmiers, dit bien dans un sourire amer la distance d’avec les rêves américains de luxe, calme et volupté – le Nouveau Réalisme est désormais une chanson triste. L’histoire de la peinture est donc elle-même convoquée, de Henri-Léopold Lévy et son Hérodiate – toile de 1872 que possède le Musée des Beaux-Arts de Brest, réinterprétée ici – à Edward Hopper (Oasis, Paradise). Le cadre est large, le vide emporte le sens, la vie est une nature morte.
Dans La Photographie sans appareil, l’écrivain Gérard Macé affirme: «ce que j’appelle la photographie sans appareil est bien plutôt cette curieuse façon, maniaque mais esthétique, de découper le réel sans laisser de traces; de scruter un visage, de regarder une coiffure ou le bas d’une robe comme on regarde une œuvre d’art; d’encadrer un paysage en disposant partout des fenêtres et des miroirs, ou leur équivalent mental; de cerner le réel comme le ferait un vitrail, mais en effaçant les couleurs pour mieux mettre en relief l’éphémère construction des lumières et des ombres. Bref, les mille et une façons d’échapper au chaos des impressions visuelles, ce qui revient à faire du temps une succession d’images impossibles fixer.»
Les pinceaux de Julien Gorgeart ne sont pas colorés que de peinture, mais d’une certaine façon de vivre le temps, de permettre au spectateur d’inventer des narrations improbables et obsédantes, comme si le présent était une plante en plastique couchée sur un piédestal blanc.
Fabien Ribery
Texte écrit à l'occasion de l'exposition "Une histoire vraie" au Musée des beaux-arts - Artothèque, Brest - 2014
15 Le Tremblay
44190 Saint Lumine de Clisson, France
Tél. : 0618714595
juliengorgeart@gmail.com
Site internet