À ma Vie, 2019

Jean-Baptiste Janisset

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Jean-Baptiste Janisset, «À ma Vie», 2019, photographie : droits réservés
Jean-Baptiste Janisset, «À ma Vie», 2019, photographie : droits réservés
Jean-Baptiste Janisset, «À ma Vie», 2019, photographie : droits réservés
Jean-Baptiste Janisset, «À ma Vie», 2019, photographie : droits réservés
Jean-Baptiste Janisset, «À ma Vie», 2019, photographie : droits réservés
Jean-Baptiste Janisset, «À ma Vie», 2019, photographie : droits réservés
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Jean-Baptiste Janisset, «À ma Vie», 2019, photographie : droits réservés
Jean-Baptiste Janisset, «À ma Vie», 2019, photographie : droits réservés

À ma Vie, 2019

Galerie Alain Gutharc Paris 7e Solo Show

Jean-Baptiste Janisset pratique une sculpture de terrain. Par le moulage, il prélève in situ des éléments divers : des sculptures, des objets, des ossements. Sa démarche implique le déplacement et la rencontre. L’artiste arpente par exemple les rues de Nantes à la recherche des traces visibles et concrétes du colonialisme et de l’esclavage. À Nantes toujours, il découvre dans la cathédrale un emblème d’Anne de Bretagne au bas duquel est gravé « À ma vie ». L’artiste le moule sur place et réalise un tirage en plâtre de l’objet. Sur un rond-point à Ziguinchor au Sénégal, il moule une partie d’une sculpture rendant hommage à Aline Sitoé Diatta (1920-1944), une résistante casamançaise surnomme?e la « Jeanne d’Arc d’Afrique ». La jeune femme aurait en effet reçu une prophétie, elle entendait des voix lui demandant d’aider à l’indépendance de la Casamance. Guidée par les voix, elle active un mouvement de désobéissance et d’émeutes. Aline Sitoé Diatta est arrêtée, condamnée par l’administration française et déportée au Mali. Elle meurt du scorbut à l’âge de 24 ans et bénéficie aujourd’hui d’une aura de martyre.

Les œuvres de Jean-Baptiste Janisset convoquent et rassemblent des histoires qui s’entrechoquent. Il pose ainsi la question de l’écriture du récit d’une histoire collective complexe et du degré de conscience que nous pouvons en avoir : à qui rend-on hommage ? Que commémorer ? Quelles icônes ? Pour qui et pourquoi ? Le récit d’une histoire commune diverge inévitablement selon les contextes. Les moulages générent alors de nouveaux objets : les sculptures-archives d’une recherche en cours. L’artiste examine ce qui fait mémoire et monument, ce qui fait histoire. De Nantes à Libreville, en passant par le Sénégal, l’Italie, l’Algérie et la Corse, il s’immerge dans la vie quotidienne et spirituelle. « Ce qui m’intéresse avant tout c’est écrire une histoire, une sorte d’éveil syncrétique.»

Les sculptures impliquent plusieurs couches de lecture. À l’histoire coloniale, dont l’artiste s’approprie physiquement les vestiges architecturaux et sculpturaux, se superpose une réflexion portée sur les croyances et les pratiques religieuses. Nous voyons alors les moulages d’ossements d’un bœuf sacrifié lors d’une cérémonie du Magal réalisé à Touba au Sénégal. La ville de Touba est fondée en 1887 par le Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké (1853-1927), un précheur musulman soufi acétique, mystique et pacifiste. Ce dernier, considéré comme dangereux par l’administration coloniale, est emprisonné et déporté au Gabon, puis en Mauritanie. Ses croyances et sa vie ont donné lieu à une nouvelle religion. La cérémonie du Magal (en wolof : « Célébrer, rendre hommage ») commémore l’exil forcé du chef spirituel. Jean-Baptiste Janisset a participé à la cérémonie en sacrifiant un bœuf qui a ensuite été partagé collectivement.

Julie Crenn