Olga Jankovic, Laurent Moriceau
La lettre diffuse s’intéresse aux messages dont la circulation et les destinataires sont imprévisibles.
La lettre diffuse est un rendez-vous singulier qui met en jeu l’attente, le hasard. M et L, les deux protagonistes de cette future rencontre sont séparés géographiquement. Ils ont choisi un lieu : Riez (village dans les Alpes de Hautes Provence). M et L ont décidé que la date leur parviendrait de façon aléatoire, grâce à la circulation d’une blague contenant une date dans sa chute. En effet, une histoire réussie, vraiment drôle, a sa propre énergie de déplacement : les gens en la racontant la propagent géographiquement.
Laurent Moriceau, Olga Jankovic en collaboration avec le Frac des Pays de la Loire ont organisé un grand concours de blague le 1 er septembre 2000 à Batz-sur-Mer. L’objet du jeu était de sélectionner une blague avec une date dans la chute de l’histoire.
La lettre diffuse et le concours de blagues.
La lettre diffuse et le concours de blagues. La lettre d’amour est un classique, et elle n’est pas, sauf lorsqu’elle sacrifie à un genre littéraire, destinée à être divulguée ; elle relève de la sphère privée. Laurent Moriceau prend ici le contre-pied et imagine dès 1997 un protocole inédit, celui de la lettre diffuse : l’artiste fixe à l’être aimé un rendez-vous à Riez, localité des Alpes-de-Haute-Provence à la consonance joyeuse ; la date, encore inconnue, devrait parvenir à sa destinataire par le truchement d’une bonne blague agissant comme « véhicule de diffusion » selon le terme même de l’artiste, sorte de virus se propageant, colportée de bouche à oreille et contenant dans sa chute une date, la date. Comment déterminer qu’une blague est vraiment excellente ? En organisant un concours de blagues, par voie d’annonce presse et vote d’un jury. Ainsi fut fait à la salle des fêtes de Batz-sur-mer, près de Nantes, un soir de l’été 2000 au cours d’une mémorable soirée présentée par un animateur professionnel. On ne sait pas si la blague lauréate a joué son office. En confiant à d’autres le soin de déterminer la date de cet événement personnel, Laurent Moriceau procède par délégation et laisse de plus au hasard un rôle capital, comme si l’impulsion donnée, l’énergie libérée, fondait seule sa démarche artistique.
Jean-François Taddei
Extrait du livre d’artiste de Laurent Moriceau intitulé :
Les Perméables/Laurent Moriceau+Invités, 2002