L’Atelier, 2000

Vincent Mauger

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Vincent Mauger, «L’Atelier», 2000, photographie : Manon Tricoire
Vincent Mauger, «L’Atelier», 2000, photographie : Manon Tricoire
Vincent Mauger, «L’Atelier», 2000, photographie : Manon Tricoire
Vincent Mauger, «L’Atelier», 2000, photographie : Manon Tricoire
Vincent Mauger, «L’Atelier», 2000, photographie : Manon Tricoire
Vincent Mauger, «L’Atelier», 2000, photographie : Manon Tricoire
Vincent Mauger, «L'atelier», 2000, DNSAP, Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris, photographie : Manon Tricoire
Vincent Mauger, «L’Atelier», 2000, photographie : Manon Tricoire
Vincent Mauger, «L’Atelier», 2000, photographie : Manon Tricoire
Vincent Mauger, 2000, l'Atelier, Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris, photographie : Manon Tricoire

L’Atelier, 2000

Ecole Nationale des Beaux-Arts de Paris

Installation "sans titre" comprenant une structure en bois et une vidéo réalisée dans le cadre du DNSAP / Atelier Tony Brown

Extrait de Partir d’un endroit où l’on n’arrive jamais par Emilie Renard

Que devient un espace une fois affranchi de la pesanteur du monde terrestre, après être passé à travers plusieurs dimensions parallèles ? Comment réagit un lieu quand il est dissocié de toute fonction, coupé de tout usage, déserté de toute mémoire, sans relation avec la terre ? Comment des objets pris dans un environnement clos se synchronisent-ils avec lui ? Comment les distorsions spatiales et temporelles subies par un espace se réverbèrent-elles à travers un objet, dans sa forme, ses matériaux, ses réactions ?

Vincent Mauger construit des systèmes à l’autonomie précaire, régis par des lois physiques spécifiques et contrôlées. Ils sont conçus pour s’adapter indifféremment à plusieurs modes de représentation d’un espace : une maquette d’architecture, une sculpture temporaire, une modélisation numérique, une animation vidéo… Plus exactement, ils sont le terrain d’expériences topologiques sur les dimensions et les déformations d’un espace défini. Ces systèmes sont modulables et passent d’une dimension à une autre : celle de notre espace physique, bien connu pour avoir quatre axes (trois pour l’espace et un pour le temps), la dimension circulaire d’un espace mis en boucle par un vecteur temporel court-circuité, la dimension projective de la maquette d’architecture, un volume constant en état de projet, enfin, la dimension vectorielle de l’espace numérique, imitation visuelle des volumes de l’ère physique…

À chacune de ces dimensions parallèles, correspond une série de conventions formelles, autrement dit, une stylistique, qui oriente aussi l’interprétation des limites de l’espace représenté. Vincent Mauger compose avec les différentes conventions propres aux dimensions physiques, visuelles ou virtuelles et construit des espaces illusionnistes à partir de matériaux simples : bois, briques, carton, papier, ou au moyen de techniques d’animation numériques et de montages vidéo élémentaires. La visibilité des subterfuges et des trucages n’enlève rien à l’effet d’étrangeté des espaces représentés qui sont tous à la fois abstraits, projectifs et matériels. Ils peuvent être regardés ou contournés, plus rarement arpentés, et demandent au spectateur de compléter mentalement les reproductions modélisées, d’entrer visuellement dans la profondeur d’une animation numérique, d’admettre de la version sculpturale d’une dimension virtuelle, de suivre un phénomène physique singulier, et enfin, de croire possible la suspension du temps et l’étirement infini d’étendues désertiques…

 

On peut supposer qu’il s’agit, au fur et à mesure des œuvres et des années, d’un seul et même espace, invariablement qualifié par un « sans titre » générique, sans cesse manipulé et modulé en fonction de ses passages à travers les filtres des différentes dimensions au contact desquelles il se métamorphose, se charge de différentes conventions, formats et textures. Il s’agira donc, à travers les translations subies par cet espace unique d’en suivre les conversions d’un mode de représentation à un autre, d’une topologie à l’autre, d’observer au passage, des distorsions ou des pertes qui apparaîtront peut-être comme des renversements contre-nature. Plus que d’un exercice de style, il s’agit d’un jeu de mise en circulation des différentes conventions de la représentation des espaces, une mise en doute de leur validité, de leur permanence et de la vérité d’une seule version de l’ordre matériel.

[…]Une sculpture presque abstraite s’annonce comme la reproduction à l’échelle un demi de son atelier à l’école des Beaux Arts de Paris dans lequel elle est exposée. Entièrement constituée de tasseaux de bois, cette version structurelle de l’atelier n’en dessine qu’une grille essentielle et incomplète, les lignes principales de l’architecture n’étant que partiellement citées. Dans cette unité matériologique, les différentes parois se superposent et s’aplatissent en un grillage massif. Il devient difficile de distinguer les fondations des élévations, le parquet du plafond. Affirmant son statut d’abstraction, ce schéma est destiné à être rempli mentalement, à être redressé, arpenté, utilisé. Envisagé dans l’espace qu’il imite, il est seulement inutile, impraticable, partiel. Il affirme par là sa position entre deux états : un croquis de l’espace qui à la fois le redouble physiquement et le cite abstraitement.[…]