Pétrole, 2006

Fabrice Hyber

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Fabrice Hyber, «Pétrole», 2006, photographie : droits réservés
Fabrice Hyber, «Pétrole», 2006, photographie : droits réservés
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Fabrice Hyber, «Pétrole», 2006, photographie : droits réservés
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Pétrole, 2006

Galerie Jérome de Noirmont Paris

Par Géraldine Miquelot
(paris-art.com)

L’énergie créatrice de Fabrice Hyber nous assaillit dès le premier tableau, Marina qui représente un ensemble d’arbres tanguant sur une eau sombre et chaotique. Les racines sont emprisonnées dans des récipients qui leur permettent de flotter tout en étant coupées de ce liquide hostile.
Des coups de fusain virevoltants, des flèches à double sens, des mots griffonnés à la hâte (&lquo;construit naturellement», ou «culbuto», ou encore «mer noire») parcourent la toile, donnant à cette étrange forêt déracinée des allures de ballet endiablé, emporté de manière inéluctable.

Usant du fusain sur la toile comme sur une planche de bande dessinée, Fabrice Hyber laisse ses «personnages» naturels (végétaux et paysages) se débattre dans un environnement qui leur est hostile.

Mais le thème du pétrole, qui se réfère sans doute à une situation géopolitique alarmante, ne donne pas lieu à des complaintes lyriques et fatalistes. C’est l’ambivalence de cette matière lourde et sombre, bénéfique et dangereuse, qui est traitée. La couleur est présente, et la nature ne s’avoue pas encore vaincue. Les feuilles de papier collées sur la toile, parfois dissimulées par la peinture, rappellent l’expression première de l’idée de l’artiste: aussi grandes et achevées qu’elles soient, les toiles restent empreintes de l’instantané de la création.

Dans Holly Oil, le liquide noir et épais inonde abondamment les arbres, tout comme l’huile de Fabrice Hyber, parfois très diluée, s’infiltre insidieusement dans les fibres de la toile. Mais les arbres, qui s’en trouvent assombris, gardent leurs reflets marron et se dressent, sur fond de ciel clair, comme un ensemble massif qui rivalise avec les jets de pétrole.

Fleur des déserts scinde un paysage en deux zones distinctes, éclaboussées d’une grosse goutte noire: le sable jaune, à droite, est jonché de mots tels que «transpiration», «naissance de pétrole», «sand», ou «affleurement». En face, l’eau bleue est ponctuée, au fusain, de «noir», «deep», «fermentation des mots».

Parfois, c’est contre une ironie inattendue que la nature doit se défendre: tel ce Rainbowwood, l’arbre en forme d’arc-en-ciel (son tronc est orné à ses deux extrémités de racines enfoncées dans le sol) qui rêvait de feuilles, dans un phylactère pensif… La Forêt de forets, dans le genre, aligne des forets de perceuses de toutes les couleurs.

Les deux caractères du pétrole se retrouvent dans les dessins. Dans Narcisse, la silhouette minimaliste d’un homme noir se mire dans une flaque sombre avec ces interrogations: «ombre? Lumière?». Comme pour se demander ce qu’il reste aujourd’hui du mirage économique qu’a été le pétrole.

L’alter-ego du pétrole, c’est Greeny, personnage vert clair, espoir du «Pétrole bio» suggéré par les mots griffonnés au fusain.

Dans Combustion, confusion, le dynamisme du trait sert à évoquer le fonctionnement du corps, à l’aide de l’imagerie de la machine, avec ses alambics, ses tubes, ses cuves et ses tourbillons. Ce qui ressemble fort à une raffinerie de pétrole possède en fait un cerveau, une bouche et une sorte d’estomac…

Pièce majeure de l’exposition, la Peinture homéopathique est constituée d’un ensemble hétérogène de toile, de peinture, et de dessins noyés dans une colle épaisse jaunissante. C’est, selon Hyber, une œuvre-synthèse qui condense et distribue toutes les informations déposées dans les dessins et les peintures. On y trouve en effet, sur un fond vert vif, les préoccupations présentes dans l’exposition: la terre, les hommes, le pétrole bien sûr.